La guerre, phénomène universel s'il en est, a fortiori dans une époque aussi troublée que la nôtre. Fléau qui a épargné notre Europe de l'Ouest depuis une soixantaine d'années...
Pourtant nos armées continuent de se battre ailleurs, au nom de la paix (quel paradoxe!). Mais les guerres actuelles ont-elles encore une parenté avec ces grandes batailles de jadis ? La technologie (les yeux du ciel) n'ont-ils pas supplanté le fantassin ? Gagne -t-on encore une guerre par les armes ?
Pierre Servent est un ancien journaliste de la Croix et du Monde, il est spécialiste des questions de défense et de stratégie pour de nombreux médias.
Son ouvrage s'intéresse aux conflits récents de ces 20 voire trente dernières années.
A travers la lecture de cet essai, on découvrira la réalité martiale de l'Afrique au Moyen Orient (opérations israeliennes au Liban et dans la bande de Gaza), en Irak, en Somalie, en Tchetchenie et enfin en Afghanistan. L'ouvrage comporte d'ailleurs en annexe le compte rendu d'audition du GAL Georgelin du 10 /09/2008. Cette audition fait suite à la mort de soldats français dans l'embuscade d'Uzbeen.
Que retenir de cet intéressant ouvrage ?
Tout d'abord, Servent met en évidence la dualité des derniers conflits.
D'un côté des armées ultra modernes, professionnelles, occidentales où le dogme du "zéro perte" préside ; des armées dont les actions sont dépendantes de l'opinion publique et de sa versatilité. N'est-ce pas ces opinions qui estiment justifiées des opérations de maintien de la paix ?
De l'autre des combattants pauvres le plus souvent, rivalisant d'ingéniosité pour marquer les esprits des opinions publiques occidentales et mener une guerre à moindre coût. Des combattants pour qui la mort agit souvent comme une délivrance.
L'auteur nous montre ensuite l'importance que les insurgés attribuent à l'utilisation des médias et leur capacité à les utiliser pour leur propagande.
Des exécutions instrumentalisées en Irak et en Tchetchénie, aux captures de soldats, en passant par les attentats, sans oublier l'utilisation de civils comme boucliers humains, le journaliste nous dresse un état des lieux inquiétants où l'on comprend que l'image devient un enjeu primordial, que les nouvelles technologies sont un enjeu dans ces batailles. L'auteur nous expose d'ailleurs que certains groupes terroristes disposent de "services" chargés d'étudier l'impact de leurs actions sur les opinions publiques occidentales... En réaction, les caméras sont de plus en plus embarquées dans les opérations des soldats occidentaux.
Devant des guerres aussi traumatisantes où l'ennemi peut être l'ami diurne, où femmes, enfants peuvent être utilisés, le militaire en opération se retrouve souvent au bord de l'abîme. Dans cet environnement, l'homme peut se laisser submergé par le désir de vengeance (Haditha), entrer dans une phase de brutalisation et de massacre. Les nouvelles technologies (blogs, internet...) peuvent conduire le militaire à partager avec le monde son quotidien et Servent nous raconte ainsi que de nombreuses images d'Irak sont parvenus au monde via ce canal...
L'essai nous évoque ensuite ces guerres où la victoire militaire ne suffit plus, où le conflit continue de durer, faute d'armistice. La reconstruction, l'aide économique (pourvu qu'elles parviennent aux populations ) deviennent alors les seuls gages de stabilité dans des pays régis par des structures tribales ou claniques.
"moi contre mon frère, mon frère et moi contre mon cousin, mon frère mon cousin et moi contre l'étranger" : de ce proverbe cité par l'auteur, on comprend que le retour à la paix ne peut être fait par l'unique usage des armes.
La guerre est aussi repensée, par l'arrivée des ethnologues qui permettent de mieux cerner les réalités locales et d'éviter les bavures, vexations, par le mix entre professionnels et réservistes issus de la vie civile... Par l'utilisation du renseignement. Servent revient ainsi sur l'intervention en 2006 d'Israel au Liban, mal préparée et les conséquences pour Tsahal.
L'essai se conclue par une annexe intéressante, dans laquelle des parlementaires interrogent le general Georgelin sur la présence française en Afghanistan. Une véritable guerre... J'ai cependant eu l'impression que certaines questions n'avaient pas obtenu de réponses. Ou alors la version est tronquée ?
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Complété d'autres ouvrages cet essai s'avère intéressant pour mieux cerner notre époque, ses troubles, ses zones de tension. La politique étrangère.
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Juste pour conclure.
quelques données qui amènent à réfléchir
Somalie : depuis 1991, le pays n'a plus de gouvernement central. L'intervention de l'onu et la mort de militaires américains (19) relatés par le film de Ridley Scott "LA CHUTE DU FAUCON NOIR" conduisirent les nations unies à se retirer du pays.
Depuis la seconde guerre mondiale, 80% des pertes dans les guerres sont des civils.
taux de suicide des GI revenant d'Irak. http://www.mysanantonio.com/military/War_lingers_GI_suicides_rise.html
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