Friday, March 24, 2017

Du feu de l'enfer, Sire Cédric

Manon Virgo est thanatopractrice, elle a un frère Ariel, un loser né qui a la particularité de se mettre dans les embrouilles.
Cette fois, il a juste piqué une bagnole, sauf que cette bagnole appartenait au membre d'un groupe particulier. Et qu'à l'intérieur, il y a un objet que ces fous sanguinaires entendent récupérer par tous les moyens.


Dernier thriller de Sire Cédric, écrivain de mon âge, qui a d'abord publié dans les littératures de l'imaginaire, ce roman marque un basculement de l'auteur vers le genre réaliste pur et dur. Fini le fantastique qui permet davantage de simplicité dans l'intrigue, place au roman policier bien documenté et surtout bien exploité. On sent qu'il y a des recherches de l'auteur derrière les thèmes développés, mais en tant qu'auteur je peux vous dire que lorsque la recherche s'insère parfaitement dans le récit, le mec maîtrise son truc. Et là, tu as bien bossé Cédric, où est la réalité, où est la fiction ? C'est nickel.
Ici, c'est nickel, parce que les articles de journaux sont employés à bon escient.


Si je reprocherais à Sire Cédric des pages où les paragraphes se limitent à des phrases simples, une volonté de littérature adrénaline comme dans tout thriller qui se respecte, ce qui est justifié sur la fin, je peux vous dire que c'est un reproche vraiment mineur car il nous embarque dans son intrigue. Et il ne va pas à la facilité d'un style au présent...

Et les lieux ?
Ok, ça se passe dans le sud, mais personne ne viendrait lui dire "c'est un roman régionaliste !" pas du tout. Sire Cédric décrit des lieux qu'il connait, il les fait vivre, il n'a pas besoin de se dépayser aux states ou ailleurs et l'intrigue est très bonne. Bien sûr, on y parle du diable, mais surtout de sectes, de sociétés secrètes, on bascule vite dans une logique du Trust No One chère à X files et à tous ces films de complot. On se demande qui va trahir, qui est un allié. Il y a encore les influences de ses précédents écrits, mais on sent que l'auteur s'en démarque, à raison... Sans les renier.

J'avoue que je me suis fait avoir à plusieurs reprises.

LES PERSONNAGES SONT BIEN CAMPES
Sire Cédric leur donne un background, m^me si on voudrait en savoir davantage sur certains d'entre eux, parce qu'on est bien dans son roman. Bien si on aime les thrillers efficaces !

Du feu de l'enfer marque donc un tournant dans la carrière d'auteur de Sire Cédric, c'est un roman efficace, visuel, qui mériterait d'être adapté en film ou plutôt en série, parce qu'il y a des pépites en France et celui-ci en est un. Bref lisez le et vous vous régalerez.

PS Bravo Cédric, juste un truc pour le prochain, surprends nous davantage encore, ni tueur en série, ni secte, chiche ?

Thursday, March 16, 2017

NOREK EN POCHE ! (Surtensions / presse pocket)

sortie de ce mois ci du dernier opus d'Olivier Norek.
Son éditeur m'ayant envoyé un sp, je vous remonte la chronique parue l'an dernier. Un excellent bouquin.

Un centre pénitentiaire, des détenus terrorisés par des congénères violents, une administration dépassée ou parfois corrompue... L'enlèvement d'un jeune Juif dans une cité de la banlieue parisienne... Une équipe de flics menée par Victor Coste qui tente de maintenir un semblant de présence étatique dans une société violente, partant en vrilles...

Difficile de résumer le dernier Norek. Si ce n'est que c'est un roman éclaté en apparence.
Les intrigues si distantes au départ nous montrent une France mise à mal par des coupes budgétaires (pénitentiaire, police, justice), par l'abandon de l'autorité rassurante, par un laisser aller, par une Justice dépassée par de nouvelles formes de criminalité nées de la crise, de la médiatisation d'affaires violentes, par l'argent facile.

Car en fait tout tourne autour de cette notion de plaisir facile, de céder à ses pulsions. Que ce soit l'enlèvement, le meurtre, le vol, le plaisir pervers, Norek pointe les travers d'une société où le libéralisme, l'instantané et le relativisme des moeurs conduisent à transformer des individus en criminels. Où l'arme devient prolongement de personnes sans doute, à la morale effacée.

A côté, Coste et son équipe font figure de personnalités usées, dépassées par cette ambiance, par cette possibilité d'être lynchées médiatiquement ou par des supérieurs carriéristes. Et puis la vie d'un flic qui se prend toute cette misère intellectuelle ou sociale en pleine tronche n'est pas simple. Les retrouvailles sont une manière de lutter contre la pression. Mais sitôt seul, on redevient un homme ou une femme.



Dans la prison, il y a les codes de prisonniers, leurs règles qui dépassent celles de la République. Celle-ci semble en retrait. C'est violent, c'est cru, c'est le constat d'un échec. C'est un roman sombre. Le constat d'une époque. Pourtant au milieu de cette société à part émerge parfois un hommage, une reconnaissance... Tout ne serait donc pas perdu ? Ou alors tout n'est-il donc qu'une question de respect que l'on gagne ?

Puis peu à peu, les pièces du puzzle vont s'imbriquer, emportant les personnages dans la folie, dans la violence, dans le dégoût. C'est beau, c'est un opéra, c'est puissant, vibrant. On dévore ce roman plus que Territoires qui était déjà un excellent roman. Il n'y a aucun temps mort.

Olivier Norek a construit Surtensions comme un thriller efficace avec plusieurs enquêtes qui nous montrent différentes facettes de la société criminelle. Les chapitres sont bien calibrés, les émotions sont intenses, le doute nous tiraille. Les relations entre les personnages résonnent en nous. Rien ne nous est épargné, mais pas dans un souci de nous choquer, plutôt de nous réveiller je dirais. Existe-t-il encore des limites ???



Volontairement, je n'en dévoilerai pas davantage, mais Surtension est à mon avis le meilleur Norek. Un roman que l'on devrait faire lire à tous nos politiciens démagogues aux donneurs de leçons, un roman qui révèle une société fissurée, fracassée..

Bravo Olivier et je te fais confiance pour que les prochains soient encore meilleurs.