Stephen King est sans doute la figure contemporaine du fantastique. Depuis les succès de Carrie et de Shining
, l'auteur nous a offert des romans aux thèmes très différents, ainsi que des nouvelles marquantes. Sa production a été aussi marquée par quelques oeuvres en dessous des autres, mais King est un humain comme les autres... La perfection n'est pas de ce monde.
Il y a un avant et après l'accident chez King. L'accident, c'est cette voiture qui l'a percuté en 1999 et lui a valu des semaines d'hospitalisation. voir ici
Après cette convalescence, King a évolué dans ses thèmes et Duma Key fait incontestablement partie de ces livres portés par une réflexion d'homme mûr.
L'histoire : Edgar Fremantle était un self made man américain, entrepreneur, bosseur. Puis un accident sur un chantier l'a laissé infirme, amputé d'un bras.
Après un coma, Fremantle se réveille, la mémoire en vrac, les pensées confuses, mû par un agressivité qui fait foirer son mariage et l'incite à partir.
Il se retrouve alors en Floride, sur une île nommée Duma Key. Là, il va se découvrir un talent incroyable pour la peinture et surtout il va se rendre compte que l'art est un vecteur de puissance, a fortiori lorsque l'art est inspiré par des puissances maléfiques.
Sur la forme : Duma Key est un ouvrage qui se mérite, un ouvrage destiné à un public qui a fait un travail sur lui-même. Jeunes lecteurs évitez donc ce Stephen King car vous manquerez d'empathie pour Fremantle.
L'histoire est assez longue à se mettre en place, à basculer dans le fantastique. On suit un homme d'âge mûr dont le monde part soudain en vrille. Adieu femme, entreprise, raison de vivre, bienvenue dans la confusion des paroles... Pour un proche de la quarantaine tel que votre humble serviteur, ce bouquin frappe au coeur, invite à se poser une multitude de questions...
Puis vient la peinture et l'entrée progressive dans le monde plus fantastique d'un King assez inspiré. Lorsque Fremantle réalise ses premières toiles, on est là à l'observer, à l'envier, à espérer que ce talent lui permettra de dépasser sa condition...
Des apparitions, un paysage torturé comme dans le raccourci de Mme Todd, une vieille femme atteinte d'Alzheimer dont les crises de lucidité donnent le frisson... Un voisin déglingué par la vie, confident et ami à la fois... King donne corps à son univers.
Enfin nous entrons dans le dernier tiers du livre et là, on n'a plus envie de lâcher le roman. Car les évènements se précipitent à mesure que le mystère de Duma Key se dévoile. Spectres hostiles, bateau fantôme, créature infernale... Fremantle doit lutter pour sa survie et celle de ceux qu'il aime...
Tout au long de ce roman que j'ai trouvé formidable, King suscite l'empathie pour son personnage, le fait évoluer, le confronte aux doutes...
Outre cette histoire, il y a dans Duma Key, une réflexion sur la place de l'art, sur son pouvoir créateur.
Sur la quatrième de couv de l'édition poche, une critique Sabrina Champenois parle de série B, de Tarantino : elle n'a rien pigé au livre. Tarantino en met plein la vue il est l'ami des critiques, de l'esbrouffe, mais pas celui du spectateur. Son Pulp fiction est une grosse daube, aussitôt vu, aussitôt oublié.
King lui a choisi d'évoluer dans ses thèmes, de se poser en homme mûr désireux de faire un bilan. Par curiosité, je suis allé jeter un oeil sur les critiques amazon et j'ai vu cette scission dans son lectorat. entre ceux ayant trouvé ce roman long et les autres...
En conclusion, Duma Key est un très très bon roman pourvu que l'on ait déjà vécu et que l'on se pose des questions. C'est un travail d'orfèvre au niveau de l'écriture, de l'imbrication des chapitres et de la construction des personnages. Great Work, Mister Stephen King.
cETTE pHOTO EST l'oeuvre de Pinguino ; elle est sous licence creative common.
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