Elle n'était pas méchante la voisine... C'était une vieille dame ordinaire qui ne demandait rien à personne, qui ne disait jamais un mot plus haut que l'autre. Elle ne s'attardait pas dehors, elle fermait sa porte. Elle n'était pas du genre à rouler sur l'or la voisine. Une fois ou deux par semaine, elle prenait sa vieille R5, le vieux modèle, le tout premier de chez Renault. Il m'est même arrivé une fois de sortir sa voiture du garage parce qu'elle avait un peu de mal à manoeuvrer, c'était il y a deux ans je crois. Faut dire que le 1er et le 16 de chaque mois, le stationnement dans la rue, c'est un peu n'importe quoi.
On se saluait quand on se voyait "bonjour, bonsoir," au mieux, un petit signe de la tête résumé d'une vie qui va très vite. Elle s'était occupée de sa maman et n'avait pas eu le temps de faire sa vie, la voisine... Elle n'avait pas vraiment de famille très proche, la voisine...
Et puis l'autre jour, j'ai dit à ma femme, c'est tout de même bizarre que les volets de la voisine ne bougent plus. Il faut que j'appelle...
Appeler qui ?
Les flics ?
J'avais peur de me faire rembarrer, le genre mec qui se fait un film. Bon sang, on n'habite pas une grande ville déshumanisée. Et puis déjà que les flics sont en sous effectif. Que la fois où je suis allé déposer plainte pour ma bagnole dégradée, ils m'ont dit que ce n'était pas une voiture qui m'avait accroché. Bref au niveau du contact, ce n'était pas gagné !
Du coup, j'ai joint la mairie, la responsable aux personnes âgées. Faut dire que j'avais sonné chez la voisine et que ça ne bougeait pas. Ensuite tout s'est passé très vite, une personne employée au service des personnes âgées est venue sonner chez la voisine. Elle m'a demandé si elle pouvait être partie, je lui ai dit que je n'en savais rien...
Après tout, je ne savais pas grand chose de la voisine.
Quand les flics sont arrivés, ils ont forcé la porte et ils l'ont trouvé dans son fauteuil la voisine. Morte depuis plusieurs jours...
Ces deux flics là m'ont dit qu'ils avaient déjà eu le cas quelques semaines auparavant dans une commune limitrophe. Ils m'ont aussi dit que ça arrivait, qu'on n'y pouvait rien.
C'était la voisine et jusqu'à sa mort, je ne savais pas comment elle s'appelait.
Elle est partie dans un sac mortuaire la voisine et maintenant, je vois sa maison aux volets toujours baissés... Et je me dis pour cette voisine là, combien d'autres, seules chez elles ? combien d'autres que l'on salue d'un signe de la tête et qui finiront ainsi ?
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