Thursday, July 03, 2008

(lecture) Royaume Désuni par James Lovegrove



Les bords de la Tamise dans les ténèbres sur fond de drapeau Union Jack et au premier plan des barbelés... Une couverture efficace à mon sens qui ne manque pas d'attirer l'attention comme le titre "Royaume Désuni".
Ajoutez à cela une quatrième de couverture intrigante et vous vous retrouvez à feuilleter le dernier roman de James Lovegrove traduit par les editions Bragelonne. (on notera tout de même que la version originale date de 2003!! )

En guise de résumé

Après certains événements socio-économiques, la Grande-Bretagne a été écartée du concert des nations qui comptent. Bombardée, divisée, elle tente de survivre ou plus exactement chacune de ses villes tente de s'adapter à cette nouvelle donne...
C'est à Downbourne que vit l'instituteur Fen Morris. Cohabitant avec sa femme Moira il poursuit son métier faute d'autre activité...Et puis un jour Moira est enlevée par un gang venu de Londres...
Contre toute attente, Fen part rechercher son épouse. Débute alors pour lui un long périple jusqu'à la capitale.

Une histoire prenante

D'emblée, on est happés par le roman de Lovegrove qui nous dépeint des personnages, communs, bourrés de faiblesse et que l'on aurait envie de secouer tant ils nous paraissent le contraire des héros. Fen Morris incarne l'archétype de l'homme moyen qui se débat dans la survie. Malheureux en ménage, lâche, il s'accommode de cette existence engluée et tente de préserver els apparences.
Puis intervient l'élément déclencheur : l'enlèvement des femmes de Downbourne.
Tandis que ses concitoyens acceptent cette épreuve avec fatalité (il était évident que les nouveaux barbares allaient attaquer Downbourne, la petite ville tranquille), Fen décide de partir à la recherche de cette épouse avec laquelle il n'avait plus grand chose en commun... Ce sera l'occasion pour lui d'évoluer, mentalement parlant.
Outre Fen, on retrouve d'autres personnages dont l'existence a tellement été bouleversée qu'ils n'ont pas su s'adapter et continuent de vivre comme si rien ne s'était passé. Et par cette galerie, Lovegrove parvient à dispenser l'empathie nécessaire.

Mais la grande force de ce roman est surtout de nous prendre à contre-pied.
Lovegrove joue avec les clichés pour mieux les détourner.
Fen va ainsi connaître de nombreux périples, découvrir qu'il faut toujours se méfier de ses concitoyens. Croyant être sauvé, il tombe de Charybde en Scylla et se remet en cause, s'adapte...
Par ses rencontres, Fen va nous confronter à nos propres certitudes.
Tout ce qui a de la valeur dans un monde policé perd de son attrait lorsque la civilisation s'est écroulée ou survit. Parfois l'auteur se montre satirique notamment avec les milieux littéraires et leurs fans, puis il s'attaque aux communautés qui ne résistent pas à la disparition de leur chef... Et d'un bout à l'autre, Lovegrove nous promène au gré des désenchantements de Fen ou de ses illusions.

Enfin l'auteur parvient à instiller une note d'humour britannique. Des piques contre les Français ou les Anglais, allez donc savoir ! des passages marrants lorsque Fen cherche à fuir une admiratrice empressée (le fameux carpe diem, mort aux poissons !) par exemple...

Et par dessus tout, le souffle de la narration. Alternant les points de vue entre le narrateur omniscient et Moira l'épouse de Fen, Lovegrove nous confronte à leurs visions du monde.
Des visions souvent contradictoires...

et pour les auteurs ?

des chapitres courts, des alternances de point de vue, une intrigue qui parvient à éviter le linéaire...



Mon seul regret est de n'avoir pas vu de plus amples développements sur le Pari Malchanceux, à l'origine de toute l'histoire...



Bref un bon 3,5/4 pour ce roman diantrement bien fichu !

Jess

No comments: